Les rues de LLN

place Raymond Lemaire

place Raymond Lemaire
1348
Louvain-la-Neuve

Lemaire

Lemaire (place Raymond)                     E5

Conseil communal du 3 septembre 2002.

Toponyme créé (toponyme non descriptif).

*        Thème du passé universitaire.

*        Thème du patrimoine wallon.

Nom donné à la place située entre la « Grand-Place » et l’« Aula Magna » en hommage au professeur Raymond Lemaire, professeur d’histoire de l’art à l’Université de Louvain et spécialisé dans les questions de conservation et de restauration des bâtiments anciens. Concepteur d’une restauration réussie du Grand Béguinage de Leuven (1964-1971), il a joué un rôle essentiel dans la conception de Louvain-la-Neuve. Initialement, la place qui porte son nom devait précéder le nouveau Musée. Ce dernier ayant trouvé sa localisation définitive entre l’« Aula Magna » et le Lac, l’avenir de cet espace reste à définir.

*          Raymond Lemaire (1921-1997) effectue ses études primaires chez les Fidèles compagnes de Jésus à Uccle, et ses humanités gréco-latines au Collège Saint-Pierre, à Uccle toujours. À l’université de Louvain, il suit tout d’abord, de 1938 à 1942, les cours de la candidature en droit, et de la licence en histoire moderne et en histoire de l’art et archéologie, ensuite. Durant la Seconde Guerre mondiale, il est volontaire de guerre au First Armoured Car Regiment, où il est amené à s’occuper de la récupération des œuvres d’art venant de Belgique et du Luxembourg. Entre 1946 et 1949, il obtient le statut provisoire de ministre plénipotentiaire et le grade de capitaine honoraire au régiment. Après divers stages, il obtient son doctorat en archéologie et histoire de l’art en 1948 à Louvain toujours. Sa thèse est intitulée : L’origine du style gothique en Brabant. Sa carrière universitaire débute alors : il sera assistant (1947), chargé de cours (1949) et professeur ordinaire (1953). En 1970, son enseignement est partagé entre l’Université catholique de Louvain et la Katholieke Universiteit Leuven. Il remet sa démission à la Katholieke Universiteit Leuven en 1971, et y est ensuite nommé professeur extraordinaire, tandis qu’il est également nommé professeur ordinaire à l’Université catholique de Louvain. En 1986, il devient professeur émérite.

Malgré ce parcours, c’est en dehors de l’université que sa carrière fut originale et exceptionnelle. Raymond Lemaire fut rapporteur et co-auteur de la charte de Venise en 1964 ; en 1965, il est, avec le professeur Piero Gazzola, cofondateur de l’International Council on Monuments and Sites/Conseil international des monuments et des sites (ICOMOS). De 1965 à 1975, il en sera le premier secrétaire général ; de 1975 à 1981, le président ; et cette même année, le président honoraire. La charte de Venise et l’ICOMOS marquèrent une nouvelle orientation en matière de restauration et de respect des monuments et des sites et influenceront profondément le traitement à réserver aux monuments historiques. Cette préoccupation amena la création à Bruges d’abord, et au sein de la Katholieke Universiteit Leuven ensuite, du Centre pour la conservation du patrimoine architectural et urbain (plus tard, Centre Raymond Lemaire, puis Raymond Lemaire International Center for Conservation [RLICC]). En matière de restauration de monuments, Raymond Lemaire s’est occupé de nombreuses églises et chapelles, de châteaux, de maisons anciennes, de fermes. Il s’est également chargé de l’assainissement de quartiers historiques (le Grand béguinage à Louvain, la « rue des Brasseurs » à Namur, etc.) et de l’aménagement de villes et villages anciens (Bruges, Bruxelles, Namur, etc.). En même temps, son action s’étend à l’étranger au service de l’UNESCO, des Nations Unies, du Conseil de l’Europe, du Centre international d’études pour la conservation et la restauration des biens culturels (ICCROM). On retiendra particulièrement les multiples missions réalisées sous l’autorité et comme représentant personnel du directeur général de l’UNESCO, le professeur Frederico Mayor, à Jérusalem et ailleurs.

Durant sa carrière Raymond Lemaire a reçu de nombreux prix internationaux : le prix triennal international pour l’urbanisme Sir Abercrombie de l’Union internationale des architectes, décerné en 1978 pour le projet et la réalisation de la nouvelle ville de Louvain-la-Neuve ; la grande médaille d’or décernée par l’Académie d’architecture de France en 1970, pour la restauration du Grand béguinage à Louvain ; le prix du Centre international d’études pour la conservation et la restauration des biens culturels (ICCROM) à Rome en 1981 et la médaille d’or européenne pour la sauvegarde et la restauration des monuments historiques à Hambourg en 1983. La Faculté polytechnique de Mons le fit docteur honoris causa. Il fut également président d’honneur de Jeunesse et Patrimoine, membre honoraire de la Commission royale des Monuments et des sites, ainsi que membre de l’Académie royale d’archéologie de Belgique.

Cela dit, c’est le rôle fondamental qu’il a joué dans la conception de Louvain-la-Neuve qui est à l’origine du choix de son nom pour une des places importantes du centre ville, qui a notamment donné son adresse à l’« Aula Magna ». C’est lui, en effet, qui fut chargé par Michel Woitrin dès 1968 de former l’équipe qui allait « solidement tenir les rênes de l’urbanisme de la ville nouvelle » (Jean-Marie Lechat). C’est que l’expertise acquise par l’historien d’art dans la réhabilitation intelligente du patrimoine architectural — illustrée notamment par la restauration du Grand béguinage de Leuven — coïncidait parfaitement avec l’idée que se faisait l’administrateur général de ce que devait être une « université-ville » : « c’est cette combinaison de l’intelligence du passé et de la sensibilité aux changements de la société qui lui [Lemaire] a permis de penser la ville nouvelle de Louvain-la-Neuve en échappant aux dangers du gigantisme de Le Corbusier, à Chandigar ou Brasilia, pour dégager l’essentiel de la tradition » (Michel Woitrin). C’est cette équipe, constituée par le groupe « Urbanisme-Architecture » (U-A) dont Raymond Lemaire assura la direction avec Jean-Pierre Blondel, professeur d’urbanisme à La Cambre, et Pierre Laconte, urbaniste également, qui a conçu le plan directeur de la ville nouvelle (adopté en 1970), et en a piloté le développement architectural jusqu’en 1982. Le projet initial de l’équipe de Victor Gruen, urbaniste américain surnommé à l’époque le père de « shopping center », était aux antipodes… En fait, si « Louvain-la-Neuve se situe délibérément dans la perspective de la ville traditionnelle » (Michel Woitrin), tout en étant à la fois une ville nouvelle très « moderne », c’est très concrètement, au-delà de la visée intellectuelle de Michel Woitrin, à Raymond Lemaire qu’elle le doit…

Bibliographie : J. Barthélémy, Raymond Lemaire (1921-1997), dans ICOMOS. Nouvelles, t. 7, n°3, p. 35-36 ; BN, t. VII, 2003, col. 233-235 [M. Woitrin] ; Hommage au professeur Raymond Lemaire, dans Bulletin spécial d’ICOMOS, Comité belge, 1999 ; M.-J. Geerts, Raymond Lemaire, Icomos : un regard en arrière, un coup d’œil en avant, Liège, 1999 ; J.-M. Lechat, Naissance de Louvain-la-Neuve. Chronique d’une aventure entrepreneuriale, Louvain-la-Neuve, 2006, passim ; P. Laconte, Louvain-la-Neuve : d’un centre universitaire et urbain à un centre urbain et universitaire, dans Les cahiers de l’urbanisme, n° 73 septembre 2009, p. 57-62 ; R. Lemaire, ICOMOS. Un regard en arrière, un coup d’oeil en avant (Dossier de la Commission royale des Monuments et des sites), Liège, 1999 ; J.-L. Luxen, Raymond Lemaire (1921-1997), dans ICOMOS. Nouvelles, t. 7, n°3, p. 34-35.

R. Labruyère

→        Aula Magna ; Grand-Place ; Louvain-la-Neuve ; Woitrin.

              

     

Classé dans : Centre Ville