Les rues de LLN

rue Pierre-Francois-Xavier de Ram

rue Pierre-François-Xavier de Ram
1348
Louvain-la-Neuve

Ram

Ram (rue Pierre-François-Xavier de)            [en réserve]

Conseil communal du (/).

Toponyme créé (toponyme non descriptif).

* Thème du passé universitaire.

Le nom du premier recteur de l’Université de Louvain restaurée (de 1834 à 1865) avait été proposé pour dénommer une rue du centre urbain à construire entre le « parc de la Source » et la « place de l’Université » [PV 41, 42 et 53]. On lui préféra ensuite « rue du Coq Hardi » (jamais confirmée), en réservant le nom pour un bâtiment universitaire [PV 55] ou une voirie du centre urbain [PV OL 3].

* Pierre-François-Xavier De Ram, premier recteur de l’Université catholique de Louvain « restaurée » en 1834, est né à Louvain le 2 septembre 1804, d’une famille d’origine zélandaise, et y est décédé le 14 novembre 1865. Entré en 1817 au petit séminaire de Malines, il y termine ses humanités à 17 ans, puis, indécis quant à son éventuelle vocation, s’inscrit à la Faculté de philosophie de l’Université de Louvain (à l’époque université d’État). Dès l’année suivante, cependant, il entre au grand séminaire de Malines, où il est ordonné prêtre le 19 mars 1827. Dès avant cette ordination, il avait été nommé professeur de poésie au petit séminaire archiépiscopal et, très vite, milite contre la politique religieuse régalienne de Guillaume Ier des Pays-Bas. Après la suppression des petits séminaires et collèges, l’abbé De Ram, devenu entre-temps archiviste du diocèse, continue la lutte contre la politique religieuse hollandaise : il publie en flamand un réquisitoire contre le Collège philosophique de Louvain et fait réimprimer des réfutations anciennes dirigées contre le Séminaire général de Joseph II. Dans un autre domaine, conscient de l’étiolement de la culture intellectuelle des populations flamandes, qui profite au propagandistes protestants, il rejoint dès 1825 l’association pour la publication de livres religieux en langue flamande, qui vient de se créer à Malines et où il édite quatre volumes de vies des saints des Pays-Bas (Levens der voornoemde Heiligen en roemweerdige persoenen der Nederlanden). À la même époque, il reprend le projet de l’abbé Jean-François Van de Velde (1743-1823) de Synodicon Belgii, un vaste projet d’édition des principaux documents normatifs de l’Église dans nos régions depuis le concile de Trente : deux volumes relatifs à l’archevêché de Malines paraissent en 1828-1829.

En 1830, après la réorganisation des petits séminaires, De Ram, tout en restant archiviste, retrouve sa place dans les rangs du corps professoral de Malines, où il enseigne la philosophie au petit séminaire, puis le droit canon et l’histoire ecclésiastique au grand séminaire. Il joue alors un rôle important dans la Révolution belge, comme conseiller éclairé de l’archevêque de Méan : c’est lui qui rédige la pétition adressée par le primat de Belgique au Congrès national le 14 décembre 1830, dans laquelle, renonçant à tous les privilèges du passé, le primat de Belgique déclare se contenter pour l’Église, « d’une parfaite liberté ». C’est lui également qui rédige en novembre 1830, à la demande de l’évêque de Liège, Mgr Corneille Van Bommel (1790-1852), la brochure politique Considérations sur la liberté religieuse, par un Unioniste, qui justifie le ralliement catholique à la Révolution. De ce point de vue, il apparaît comme le prototype du catholique libéral, qui s’inscrit d’emblée dans le programme défendu par Félicité-Robert de Lamennais (1782-1854) dans le journal L’Avenir qu’il vient de fonder : « une Église libre dans un État libre ». Même si chez nous, ce ralliement catholique aux libertés modernes est surtout « tactique », comme l’a bien montré Henri Haag, c’est lui qui a permis le succès de la Révolution belge et a assuré le développement d’un catholicisme constitutionnel durable. C’est dans ce contexte d’ailleurs, qu’est « restaurée » en 1834 l’Université « catholique » de Louvain, dont De Ram est nommé premier recteur. Inaugurée à Malines, l’Université sera transférée à Louvain l’année suivante, lorsque le jeune gouvernement belge décidera — ce que les évêques avaient subodoré — de supprimer l’Université d’État hollandaise de Louvain au profit de Gand et Liège.

Cette restauration mérite quelques éclaircissements. L’objectif des évêques belges était avant tout de parachever l’édifice scolaire qu’ils venaient de mettre en place à la faveur de la liberté d’enseignement proclamée par la nouvelle constitution. Leurs préoccupations étaient essentiellement pastorales : former les élites dans un esprit vraiment « catholique » et à travers elles, conserver le peuple à la foi de ses pères ; former des enseignants catholiques pour les collèges, former des médecins qui, à l’heure du trépas, favorisent le contact avec un prêtre, constituer les cadres du « parti » catholique, etc. Il est clair que sous ce rapport, les universités d’État représentaient à leurs yeux un véritable danger. Mgr Van Bommel, avait bien résumé leur point de vue en 1830 : « Tous les ans nos universités continuent à vomir sur la surface de la Belgique catholique une pluie de jeunes destinés à avoir de l’influence sur le pays et sur les familles et en qui la foi est ébranlée, sinon ruinée. […] La portion la plus intéressante de la jeunesse va se perdre dans les mauvaises universités que le libéralisme maintient et que l’on ne peut espérer voir tomber que par l’érection sur une grande échelle d’une bonne université orthodoxe ». Dans ce contexte, l’idée de créer une université organisée par l’Église dans le cadre de la liberté d’enseignement fut proposée concrètement par l’évêque de Gand, évêché où l’abbé Jean-François Van de Velde, précisément, bibliothécaire de l’ancienne université de Louvain et dont De Ram avait repris certains travaux, avait entretenu la nostalgie de l’ancien Studium generale supprimé par le Régime français en 1797. Le projet séduisit l’épiscopat, qui l’annonça aux fidèles dès février 1834 dans une lettre pastorale : « Les Belges se rappellent la gloire dont jouit pendant quatre siècles la célèbre université de Louvain, où la science unie à la foi formait des hommes instruits et bons chrétiens ; et tous ceux qui ne se sont pas laissés éblouir par de vaines théories désirent voir la jeunesse, espoir de la patrie, revenir à cet accord si fécond en heureux résultats et ils attendent de leurs premiers pasteurs, intimement unis avec l’auguste chef de l’Église, qu’ils leur ouvrent la voie ». L’idée était de former les élites dans une atmosphère où le catholicisme imprégnerait tous les aspects de la vie, sûres au plan doctrinal et moral, de façon à produire les cadre laïcs, selon l’excellente formule du chanoine Aubert, « de l’ersatz de chrétienté, que l’Église de Belgique visait à constituer dans les cadres de l’État libéral ». Cela dit, mennaisien convaincu, De Ram allait s’attacher à faire de la nouvelle université, avec l’aide du nouvel archevêque Engelbert Sterckx (1792-1867), un foyer de ralliement au nouveau régime, tout en s’attachant à l’inscrire résolument dans la continuité historique de l’antique Universitas Lovaniensis : « réinvestissement » de ses hauts-lieux anciens (Halles universitaires et antiques collèges) ; reprise des traditions et pompes académiques d’autrefois ; défense et illustration de la vieille Alma Mater à travers ses discours universitaires et les innombrables contributions historiques publiées dans les Annuaires de l’Université. En bon « patriote », De Ram contribua d’ailleurs également à consolider les « fondements historiques » de la « nation belge », à travers d’innombrables interventions et publications comme membre de la Commission royale d’histoire (1934), de l’Académie royale de Belgique (1837), et plus tard, des Analectes pour servir à l’histoire ecclésiastique de Belgique (1863).

Bibliographie : R. Aubert, L’Université « catholique » de Louvain de 1834 à nos jours, dans Une aventure universitaire, sous la dir. de G. Ringlet, Louvain-la-Neuve-Bruxelles, 2000, p. 319-342 ; BN, t. V, col 650-670 ; H. Haag, Les origines du catholicisme libéral en Belgique (1789-1839) (Université de Louvain. Recueil de travaux d’histoire et de philologie, Série 3, t. XXXVI), Louvain, 1950 ; UCLVMI, p. 129-175 ; UL 1425-1975, p. XXX.

L. Courtois.

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