Les rues de LLN
rue Zénobe Gramme
Gramme
Gramme (rue Zénobe) D8-E8
Conseil communal du 22 juin 1976.
Toponyme créé (toponyme non descriptif).
* Thème des figures de nos régions.
« Rue Zénobe Gramme » (1826-1901) évoque ce physicien autodidacte et inventeur liégeois de la première dynamo utilisable.
* En appelant une rue « Zénobe Gramme », la Commission de toponymie a honoré le créateur wallon de la première machine pratique qui ait contenu les éléments essentiels des dynamos actuelles. Né à Jehay-Bodegnée (province de Liège) le 4 avril 1826, Zénobe-Théophile Gramme est un passionné de menuiserie. Désireux de se perfectionner, il fréquente en 1849 les cours du soir de l’École industrielle à Liège où il suit surtout les cours de dessin. Six ans plus tard, il se rend à Bruxelles, Paris, Lyon et Marseille en vue d’y exercer son art mais il n’y rencontre que la misère. À la fin de l’année 1856, Gramme s’établit à Paris et est embauché dans un grand atelier de menuiserie. En 1860, en qualité d’ouvrier modeleur, il travaille pour la société L’Alliance, spécialisée notamment dans la construction de machines magnéto-électriques à courant alternatif mises au point par l’abbé belge Nollet ; ces appareils étant d’une structure compliquée et d’un rendement médiocre, Gramme entreprend de les améliorer et fait ainsi son véritable apprentissage technique. Peu à peu, il délaisse la menuiserie pour l’électricité. Trois ans plus tard, il se perfectionne chez Ruhmkorff, qui produit des bobines à induction.
En 1864, Zénobe Gramme entre au service de l’ingénieur français Ernest Bazin ; il le suit à Angers puis à Lorient et à Paris. Il se familiarise alors avec les travaux de Faraday, d’Ampère et de Franklin, qui ont établi les lois de l’induction électromagnétique. Il fabrique des lampes à arc à régulateur. En 1867, Gramme prend un premier brevet « pour plusieurs dispositifs perfectionnant les machines à courant alternatif ». Un an plus tard, il gagne Londres et travaille chez Disderi. Au départ des principes élaborés par Pacinotti et Siemens, Gramme invente la dynamo : machine rotative produisant du courant continu dans laquelle le flux magnétique de l’inducteur est guidé dans le rotor par un anneau de fer ; sur ce rotor, l’inventeur wallon a fixé des collecteurs qui amènent le courant à des balais, la dynamo fournissant elle-même le courant nécessaire à son excitation. Par rapport aux premières productions industrielles, la dynamo fournit dix fois plus d’énergie et pèse huit fois moins. Cette invention va apporter à son créateur une notoriété mondiale ; elle va avoir des conséquences décisives pour l’exploitation de l’électricité et la construction électromécanique.
Rentré à Paris, Zénobe Gramme décide de se consacrer entièrement à ses recherches. Il obtient à la fois le brevet français pour son invention et les premiers subsides permettant de mettre en application industriellement son prototype. Lorsque la guerre franco-allemande éclate, il se réfugie chez ses sœurs à Arlon et y reste jusqu’en juin 1871. La dynamo est présentée à l’Académie des Sciences de Paris en juillet 1871. Associé à Hippolyte Fontaine, industriel expérimenté et inventif, Gramme fonde la Société des machines magnéto-électriques Gramme. Six ans plus tard, trois cent cinquante machines sont déjà construites. Gramme ne cesse d’améliorer son invention. En 1873, il met au point une nouvelle génératrice, principalement destinée à la galvanoplastie, qui fournit 3 000 ampères sous une tension de 6 volts et permet ainsi de précipiter 800 kg de cuivre affiné en 24 heures. L’année suivante, il propose une première dynamo dite « d’atelier » permettant d’alimenter des lampes à arc. En 1875, Hippolyte Fontaine établit la réversibilité de la machine de Gramme : lorsqu’elle est alimentée en électricité, celle-ci fonctionne comme un moteur. Les applications de la dynamo se poursuivent avec l’apparition des ampoules lumineuses à filament incandescent et des premiers tramways.
Les récompenses et les honneurs saluent, enfin, le grand inventeur wallon. En 1877, Zénobe Gramme est fait Chevalier de la Légion d’honneur. Trois ans plus tard, il obtient un prix de 20 000 francs de l’Académie des Sciences de Paris. En 1888, il reçoit le Prix Volta (50 000 francs), décerné jusqu’alors uniquement à son ancien maître Ruhmkorff (1864) et à Graham Bell, pour l’invention du téléphone (1880). À partir de 1894, Gramme entre dans une semi-retraite et jouit des revenus procurés par son invention. À l’occasion de l’Exposition internationale de Bruxelles de 1897, il est promu au grade de Commandeur de l’Ordre de Léopold. L’année suivante, il fait l’objet d’une grande manifestation internationale de reconnaissance et d’admiration à Bruxelles. Bien qu’imprégné de l’esprit français, Gramme conserve la nationalité belge. Il meurt le 20 janvier 1901 à Bois-Colombes (département de la Seine) et est enterré au Père-Lachaise.
Plusieurs monuments, en Belgique comme en France, rendent hommage à Zénobe Gramme. Le plus imposant, réalisé par Thomas Vinçotte, est inauguré en 1905 à Liège. Il rappelle à la fois sa vie d’ouvrier et son œuvre. « Avec Pasteur, qui fut un savant formé aux grandes écoles, Gramme, qui n’était au départ qu’un simple menuisier, appartient à la légende dorée du XIXe siècle tout entier ». Plusieurs plaques commémoratives sont apposées en Wallonie. En 1930, lors de l’Exposition universelle de Liège, une Journée Zénobe Gramme se déroule en présence des souverains belges.
Bibliographie : Apports de Liège au progrès des sciences et des techniques, Liège, 1981, p. 50, 387-392 ; BN, t. XXIX, col. 627-634 ; DHB, p. 229 ; Florilège des sciences en Belgique pendant le XIXe siècle et le début du XXe siècle, s.l., 1968, p. 227-241 ; IC, p. 178 ; Inventeurs et scientifiques : dictionnaire de biographies, Paris, 1992, p. 267 ; NDB, p. 269 ; J. Pelsenner, Zénobe Gramme : notice bio-bibliographique, suivie de la description de la dynamo par son inventeur et d’autres documents, 2e éd., Bruxelles, 1944 ; C. Rasir et L. Maraite, Zénobe Gramme à contre-courant, Bruxelles, 2001.
S. Pasleau