Les rues de LLN
chemin Mercator
Mercator
Mercator (auditoires) D8-E8
Mercator (bâtiment) D8-E8
Mercator (chemin) D8-E8
Domaine universitaire. Conseil communal du 28 juin 2010 (chemin).
Toponyme créé (toponyme indirectement descriptif).
* Thème des figures de nos régions.
* Thème du patrimoine européen et universel.
* Thème du passé universitaire.
* Thème des sciences exactes.
* Thème des toponymes descriptifs.
Il pourrait paraître peu original d’appeler le bâtiment du Département de géographie et ses auditoires « Mercator », mais s’agissant d’un cartographe de nos régions formé à l’Université de Louvain, le choix se comprend aisément.
Avec le développement du quartier du RER et le réaménagement de la zone « Pasteur » (entre la « voie des Hennuyers » et l’« avenue Georges Lemaître »), la Commission de toponymie s’est intéressée aux chemins conduisant à la « place Louis Pasteur » et qui n’avaient pas de noms. Pour le chemin conduisant vers l’« avenue Georges Lemaître » et longeant le « bâtiment Mercator », elle a simplement proposé d’en reprendre le nom [PV OL 2, 12 et 13].
* Gerard de Cremer, dit Mercator (Rupelmonde, 5 mars 1512 – Duisburg, 2 décembre 1594) se situe à l’avant plan de l’humanisme avec une œuvre cartographique qui engrange les découvertes des grands navigateurs et avec un travail de calligraphie orienté non seulement vers la gravure sur les instruments scientifiques mais aussi vers l’imprimerie. Son rêve est d’embrasser le monde depuis sa création jusque dans ses moindres détails, la philosophie, les mathématiques, tout l’intéresse. Il est un des grands représentants de l’insatiable curiosité de son époque. Inscrit à l’Université de Louvain le 29 août 1530, parmi les étudiants pauvres du château, parmi les pauperes ex castro, celui qui plus tard honorera les commandes de luxueux instruments scientifiques de Charles V, est promu magister artium de l’Université en 1532.
Il fait ses premiers pas dans la vie professionnelle sous la houlette de Gemma Frisius qui était venu s’installer à Louvain, centre d’études astronomiques, et géographiques. La première carte de Mercator paraît en 1536, l’année de son mariage, elle représente la Palestine. En même temps, il prend part à l’élaboration des globes terrestre (1536) et céleste (1537) de Gemma. Dès cette époque et durant toute sa vie, Mercator a poursuivi simultanément des travaux de recherche cartographique, mathématique ou encore portant sur le magnétisme et la réalisation matérielle de cartes, de globes et d’autres instruments dont l’esthétique ne laisse personne insensible. Et lorsque cinq ans plus tard, il remet à Nicolas Perrenot de Granvelle, son propre globe terrestre, des éléments totalement nouveaux y font leur apparition. Une île magnétique, indique le pôle nord magnétique distinct du pôle nord géographique, expliquant les erreurs de la boussole, que nous appelons aujourd’hui déclinaison magnétique. Un nouveau premier méridien a été choisi, où la déclinaison magnétique était nulle. Malheureusement Mercator ne sait pas que cette déclinaison varie dans le temps, son choix n’est donc pas bon, il le modifiera d’ailleurs sur la carte du monde en 1569, pour choisir un autre lieu de déclinaison nulle. Ce phénomène de déclinaison magnétique, le conduit à penser que l’on pourrait résoudre, grâce à cela, le fameux problème des longitudes pour la solution duquel les rois catholiques ont déjà proposé des fortunes. On pourrait, pensait-il, si l’on connaissait la longitude et la latitude de cette île magnétique, déterminer la longitude l’un lieu, lorsque l’on connaît sa latitude, qui d’ailleurs se mesure aisément. Pour ce faire il suffirait de mesurer la déclinaison magnétique, qui, elle aussi, se mesure aisément. Cette belle idée serait exploitable aujourd’hui, puisque l’on peut suivre, d’instant en instant, les modifications du champ magnétique terrestre sur internet. Mais le mouvement des pôles magnétiques la rend impossible pour Mercator. Il n’empêche que c’était une belle idée.
Un dernier apport, sur ce globe terrestre, aura des répercussions très importantes qui feront la célébrité de Mercator. Les rhombes, ces droites qui indiquaient les directions des vents y sont remplacées par des lignes légèrement courbes qui indiquent la route des navires lorsqu’ils suivent la boussole. Nous appelons ces lignes des loxodromes, un nom qui leur fut donné par Snellius. Pedro Nunes venait de signaler ce fait de manière encore imprécise Mais Mercator va le comprendre parfaitement. Lorsqu’un bateau suit la boussole, il coupe tous les méridiens sous un même angle que l’on appelle angle de route, précisément celui qui est indiqué par la boussole.
Cette réflexion va se poursuivre alors qu’en 1544, il est mis en prison pour hérésie, qu’il termine le globe céleste en 1551 et qu’en 1552, il quitte Louvain pour Duisburg. Elle mûrit lors de la préparation de la carte d’Europe qui sera terminée en 1554. Il y annonce qu’il a étudié avec beaucoup de soins, la projection et la reproduction du réseau de méridiens et de parallèles qui forment le canevas de la carte. Mais ce n’est que 15 ans plus tard que sa découverte verra le jour avec la publication de la carte du monde en 1569. Découverte en avance sur son temps, puisqu’elle ne s’explique aujourd’hui qu’au moyen d’une intégration ou de la fonction logarithme dont les dates de naissances officielles sont respectivement 1667 (Newton) et 1614 (Neper). La somme de travail que constitue cette carte est difficilement imaginable. Il a d’une part creusé cette idée de loxodrome, si utile aux marins, pour arriver à trouver la projection qui transformait ces courbes qui s’enroulaient indéfiniment autour du pôle en des droites. Mais, d’autre part, il fallait aussi que cette projection soit conforme, c’est-à-dire qu’elle conserve les angles, pour que l’angle de cette droite loxodromique, soit bien celui que le marin lit sur la boussole. Pour cela il fallait introduire des latitudes croissantes. Par ailleurs, Mercator a consulté et comparé, pour établir cette carte, toutes les cartes espagnoles et portugaises, ensuite il en a confronté les résultats aux récits de voyages des grands navigateurs. On mesurera l’immense travail qui se cache derrière cette dernière phrase en imaginant la quantité de cartes et de récits de voyages qui ont été suscités par la découverte du nouveau monde.
Malheureusement les marins n’ont pas compris immédiatement les nombreux avantages de cette carte et la vie de Mercator se poursuit aisée et laborieuse. Ses fils vont commencer à l’aider dans sa tâche immense, mais un seul d’entre eux lui survivra qui publiera sa dernière œuvre laissée incomplète, son Atlas, ce recueil de cartes, comme son nom l’indique aujourd’hui, mais il est le premier à le porter. L’Atlas se compose de deux parties. Dans la première, Mercator propose une réflexion sur la création du monde et la seconde, les cartes, montre les détails de l’objet créé. Il s’agit de la réalisation, forcément incomplète, du rêve de toute une vie.
Bibliographie : Album Antoine De Smet (Publications du Centre national d’histoire des sciences, IV), Bruxelles, 1974, p. 193-274 et 275-304 ; A. De Smet, Mercator à Louvain (Duisburger Forschungen, VI), Duisburg, 1962, p. 28-90 ; Id., L’œuvre cartographique de Gérard Mercator à l’occasion du 450e anniversaire de sa naissance, dans La Revue belge de géographie, t. LXXXVI, 1962, n° 2, p. 67-84 ; P. Radelet-de Grave, Le magnétisme chez Mercator et la situation des marins en mer, Anvers 1994, p. 208-219 ; J. Van Raemdonck, Gérard Mercator, sa vie et ses œuvres, Sint-Niklaas, 1869 ; N. Crane, Mercator .The Man Who Mapped the Planet, Londres, 2002.
P. Radelet-de Grave