Les rues de LLN
chemin Aristote
Aristote
Aristote (chemin d’) E5
Conseil communal du 11 avril 1978.
Toponyme créé (toponyme indirectement descriptif).
* Thème des sciences humaines.
* Thème du patrimoine européen et universel.
Le « chemin d’Aristote » conduisait à l’Institut supérieur de philosophie, avant que celui-ci ne quitte le Collège Thomas More (Faculté de droit) pour occuper le Collège Désiré Mercier, son nouveau bâtiment construit en 1995 à la « place Cardinal Mercier ». On peut donc considérer le « chemin d’Aristote » comme un « souvenir » toponymique de l’ancienne localisation de l’Institut supérieur de philosophie…
* « Chemin d’Aristote » (vers 385-322 av. J.-C.) fait allusion à ce philosophe grec, disciple de Platon, qui vit dans la philosophie la totalité ordonnée du savoir humain [PV 28, 29].
Aristote est né en 384 avant J.-C. à Stagire, colonie grecque située en Chalcidique de Thrace. Son père était médecin du roi de Macédoine Amyntas III, père de Philippe II. À l’âge de dix-sept ans, il se rendit à Athènes, où il suivit l’enseignement de l’Académie de Platon jusqu’en 347, année de la mort de ce dernier. Il quitta alors cette ville, peut-être en raison de l’influence croissante de Démosthène et du parti antimacédonien, et séjourna à Assos (Troade) et à Mytilène (Lesbos), où il enseigna et mena de nombreuses recherches zoologiques. Vers 343, Philippe II de Macédoine le nomma précepteur de son fils Alexandre. Le philosophe initia le futur conquérant à la littérature grecque, en particulier L’Iliade, mais également à la « politique », à laquelle il s’intéressait beaucoup (l’une de ses œuvres aujourd’hui perdues portait le titre Alexandre ou des colonies). En 335, après qu’Alexandre fût monté sur le trône, Aristote revint à Athènes où il fonda sa propre école philosophique, le Lycée. À la mort d’Alexandre en 323, sous la menace d’une condamnation pour impiété dont le motif véritable résidait dans ses affinités avec la Macédoine, il s’exila à Chalcis (Eubée), où il mourut l’année suivante.
Pour dégager les grandes caractéristiques de la production abondante d’Aristote — dont seulement un cinquième est parvenu jusqu’à nous —, il est intéressant de s’en remettre au jugement de la postérité. Ainsi Dante, dans sa Divine Comédie, n’hésite pas à désigner le philosophe comme « le maître de ceux qui savent ». Cette appréciation renvoie au caractère universel et encyclopédique de sa pensée : son esprit ouvert et curieux a embrassé toutes les disciplines du savoir, depuis la logique jusqu’à la métaphysique, en passant par la biologie et l’histoire naturelle, l’éthique, la politique et l’histoire constitutionnelle, la rhétorique et la poétique… La célèbre fresque de Raphaël intitulée L’École d’Athènes présente en son centre Platon, muni de son dialogue le Timée et levant symboliquement le doigt vers le ciel, tandis qu’Aristote, debout à ses côtés et tenant d’une main son Éthique à Nicomaque, tend l’autre bras vers l’avant. C’est ainsi qu’on a souvent opposé le biologiste réaliste à l’idéaliste féru de mathématiques : pour le Stagirite, la compréhension du monde passe par l’observation minutieuse de chacun des éléments le composant.
L’influence d’Aristote sur la culture et la pensée occidentales fut énorme. Ses écrits de logique — réunis sous le titre d’Organon — furent d’une importance capitale pour le développement de la scolastique médiévale. Son impact a continué de se manifester à l’époque moderne où des philosophes tels que Francis Bacon — dont un écrit porte le titre révélateur de Novum Organum — n’ont pu s’empêcher de se référer à son autorité, malgré le dédain qu’ils affichaient à l’égard de la philosophie antique. Ses traités de sciences naturelles ont été utilisés par Georges Cuvier et Charles Darwin. Dans le domaine littéraire, sa Poétique, œuvre dans laquelle il définit la nature et les règles de l’épopée et de la tragédie, exerça un grand attrait sur des écrivains tels que Ben Jonson, John Milton, Racine, Lessing, ou encore Umberto Eco.
Bibliographie : R. Bodéus, Aristote, dans Patrimoine littéraire européen. Anthologie en langue française, sous la dir. de J.-C. Polet, t. II, Héritages grec et latin, Bruxelles, 1992, p. 227-244 ; D. Frede, P.J. Rhodes, Aristoteles, dans Der Neue Pauly. Enzyklopädie der Antike, sous la dir. de H. Cancik et H. Schneider, t. I, Stuttgart-Weimar, 1996, col. 1134-1145 ; A.A. Long, Aristotle, dans The Cambridge History of Classical Literature, sous la dir. de P.E. Easterling et B.M.W. Knox, t. I, Greek Literature, Cambridge, 1985, p. 527-540 ; The Oxford Companion to Classical Literature, 2e éd., sous la dir. de M.C. Howatson, Oxford, 1989, p. 56-60 ; P. Pellegrin, Aristote, dans Le savoir grec. Dictionnaire critique, sous la dir. de J. Brunschwig et G. Lloyd, Paris, 1996, p. 600-621.
O. De Bruyn