Les rues de LLN

scavée du Biéreau

rue: scavée du Biéreau
canton postal: 1348
localité: Louvain-la-Neuve
description:

Biéreau

Biéreau (ferme du)          F7

Biéreau (porte du)     [abandonné]

Biéreau (quartier du)

Biéreau (scavée du)   E6-E7-F7-F8

Biéreau (sentier du)       E6-F7

Conseil communal du 27 juillet 1972 (scavée) et (?) (sentier).

Toponyme repris tel quel à la tradition.

*    Thème des toponymes traditionnels.

Bien avant l’existence de Louvain-la-Neuve, l’ancienne entité d’Ottignies était composée, outre le village, de neuf hameaux : la Baraque, le Blanc Ry, le Blocry, les Bruyères, la Croix, Franquenies, le Petit Ry, Pinchart et le Stimont. Trois de ces hameaux — qui subsistent toujours dans la toponymie ottintoise – ont donné leur nom à des quartiers de la ville nouvelle (le « quartier du Biéreau », le « quartier de l’Hocaille » et le « quartier des Bruyères ») et deux à des sous-quartiers (le « quartier de la Baraque » et le « quartier de Blocry »). La « campagne de Biéreau » s’étendait autrefois autour de la ferme du même nom, propriété de l’abbaye de Florival.

Lorsqu’il fut décidé (en 1992) de nommer les accès intra-urbains à partir des boulevards extérieurs (antérieurement qualifiés d’« avenues »), on pensa un moment utiliser des toponymes descriptifs : la « porte du Biéreau » eût ainsi désigné la voie d’accès au « quartier du Biéreau ». Sur le « boulevard Baudouin » cependant, les trois portes donnaient toutes accès au « Biéreau » La Commission a donc proposé de les désigner du nom de la voirie à laquelle elles donnaient accès. Au « boulevard de Lauzelle », par contre, les noms de « porte de Lauzelle-Quatre-Vents », « porte de Lauzelle-Vallon » et « porte de l’Hocaille » sont appropriés.

*   Comme le montre la mention la plus ancienne (Bearewart, en 1272), Biéreau, en wallon Bièrô, est à l’origine « beau reward », c’est-à-dire « beau regard ». Ce nom laudatif équivaut à « belle vue » et évoque le superbe panorama qui s’étend devant la ferme, vers le hameau de Blocry et la vallée de la Malaise. Les formes anciennes peuvent être réparties en deux groupes : un premier groupe de formes francisées se rattachant à Bearewart et un second avec des formes plus proches du wallon Bièrô. La forme originelle « Beau Reward » contient un trait wallon, à savoir le maintien du w germanique, que le français a transformé en g. Le mot regard se rattache au verbe garder, lui-même issu de l’ancien germanique *wardôn. En wallon namurois, garder se dit aurder, car le w disparaît souvent devant un ô long ; comparer Wavre ~ wallon Ôve, gaufre ~ wallon ôfe, etc. L’évolution de la finale ‑ard en ‑ô est, elle aussi, tout à fait régulière en wallon : comparer renard ~ wallon rënô. L’adjectif beau, qui compose la syllabe initiale, se dit normalement bia en wallon. L’altération de bia en biè est probablement due à une action de la voyelle de la syllabe finale, avant son passage à ‑ô.

Ce type toponymique « Beau-Regard » est bien connu en Wallonie : c’est le nom d’une commune de l’arrondissement de Namur (Bierwart, en wallon Bièrau), d’une dépendance de Huccorgne (arrondissement de Huy) et de divers lieudits, comme anciennement Beaurewart à Nivelles, Bierraux à Dampremy (Charleroi), etc. Il est aussi très fréquent en France, à côté de types comme « Belle-Vue, « Beauvoir », etc. [BTD, IX, p. 89, XIX, p. 54, XXIII, p. 170, XXIX, p. 54 ; QSNL, p. 25 ; EDTW, p. 70 ; TW‑Nivelles, 11 ; ONCB, p. 71 ; TDF, p. 223 ; WAV, XXI, p. 77-78 ; NCW, p. 19 ; NLB, p. 52].

Bien qu’en 1968 on trouvât encore mention de « Bierwart », l’usage local privilégiait la forme wallonne. C’est donc à partir de cette forme que l’on a formé les toponymes du site universitaire. Comme l’a fait remarquer A. Goosse, il convenait de faire une légère transformation dans la syllabe initiale, car dans le système orthographique du français, un è ne se trouve pas à l’intérieur du mot, sauf devant une syllabe contenant un e muet (lèpre ~ lépreux, sévère ~ sévérité…). La Commission de toponymie n’a cependant pas rectifié la syllabe finale, qui ne contient évidemment pas le suffixe ‑eau à l’origine, parce qu’elle a estimé que l’usage de la graphie avec ‑eau était bien répandu depuis longtemps [D 20 novembre 1972]. La présence de l’article contracté du, employé dans les formes composées, n’est pas justifiée : Biérô est figé sans article dans les mentions anciennes et le wallon dit cinse dë Bièrô, ce qui aurait dû être traduit « ferme de Biéreau » ; les autres composés auraient également dû suivre cet usage.

La ferme, ainsi que plus de 110 hectares de terres et bois s’étendant sur le plateau entre la Baraque, Blocry et les Bruyères, a été propriété de l’abbaye de Florival jusqu’en 1798 [OTA, p. 153 et 154 ; LLNE, p. 90, 131-133 ; WAV, XXI, p. 71-81].

Avec l’installation de l’Université sur le « plateau de Lauzelle, la ferme est devenue très vite un haut lieu d’animation culturelle du site. Occupée par une maison communautaire comprenant des résidents (André  et Annick Vekemans, ainsi que leur quatre enfants) et une dizaine d’étudiants, la ferme organisait régulièrement des spectacles, des rencontres-débats et un ciné-club dans l’écurie. Elle accueillait également divers ateliers (mécanique, menuiserie, photographie, etc.) permettant à tout un chacun de bricoler avec l’aide d’étudiants compétents souvent issus de la Faculté des sciences appliquée. Enfin, elle tenait un bar réputé (le « Bar du Biéreau ») installé dans les vieilles caves voûtées du corps de logis (aujourd’hui le « Caveau sauvage »), qui, en ces temps de pionniers, gardait ses portes ouvertes jusqu’à des heures avancées, alors que les autres bistrots fermaient à une heure du matin…

Pendant de longues années, la grange et le fenil sont restés inoccupés faute d’aménagements indispensables mais trop coûteux pour l’Université. C’est dans ce contexte qu’est née l’idée d’un partenariat entre la ville et l’Université pour transformer cet ensemble, avec l’aide des pouvoirs publics, en un centre dédié à la musique. Le projet a permis la restauration et l’aménagement des vieux bâtiments de ferme en une très belle salle de concert desservies par des infrastructures très modernes : la « Maison de toutes les musiques à Louvain-la-Neuve ». Parallèlement, l’ASBL « Corps de logis-Ferme du Biéreau » a poursuivi l’animation communautaire des débuts.

-     Biéreau : en wallon Bièrô

Isolé :

1272-1274, « Bearewart » [WAV, XXI, p. 77] ; 1515, « Bierwaulx » [AGR, GSN, n° 1548bis, WAV, XXI, p. 77] ; 1515, « le chemin qui vat de Blocquerie à Berwart » [AGR, GSN, n° 1548bis, WAV, XXI, p. 79 ; OTA, p. 170] ; 1527, 1601, « Beaurewart » [AGR, GSN, n° 1548bis, WAV, XXI, p. 77 ; T&W‑W, p. 138] ; 1543, « le chemin allant de Beaurewart à Neufsart » [AGR, GSN, n° 1548bis, WAV, XXI, p. 79 ; OTA, p. 169] ; 1543, 1592, « Beaurewaert » [AGR, AE, n° 6995, WAV, XXI, p. 77] ; 1676, « le champ del Spinette vers Bierwau joindant aux terres du dit Bierwau » [AGR, GSN, n° 1534, D Martin] ; 1718, « chemin venant de Wavre à Bierwart » [AGR, GSN, n° 1535, D Martin] ; 1745, « Bieraux » [Villaret, D Martin] ; 1768, « le chemin de Bierwart » [AGR, GSN, n° 1542, D Martin] ; 1773, « le chemin qui va de Bloquerie à Berwart » [OTA, p. 170], « le chemin qui va de Bierwart à Blocquery » [AGR, GSN, n° 1543, WAV, XXI, p. 79] ; 1787, (?), « Bierwart » [T&W‑W, p. 138 ; LLNE, p. 130- 135] ; 1791, « la ruelle tendant de Blocry à Bierwart » [AGR, GSN, n° 1548, WAV, XXI, p. 79] ; 1831, Biereaux [Ferraris] ; 1846, le sentier de Bierreau à Corbais, « Bieraux », « le chemin allant de Beaurewart à Neufsart » [ACV‑Ott] ; 1965, « Biereau » [PlanB‑O] ; 1981, « Bièrau » [IGN].

Déterminé :

1696, « la Basse Bierwart » [AGR, GSN, n° 1534, WAV, XXI, p. 78] ; 1699, « une terre sur la Basse-Bierwart » [OTA, p. 169].

Déterminant :

Le toponyme le plus fréquent, composé à partir de « Bierwart », est celui servant à désigner la ferme. 1529, « la maison de Berwart, empris Bierwau » [AGR, GSN, n° 5996, WAV, XXI, p. 77] ; 1655, « la maison de Bierwart » [AGR, GSN, n° 5999, WAV, XXI, pp. 77-78]. 1706, « la cense de Bierweau » [AGR, GSN, n° 1535, WAV, XXI, p. 77] ; 1727, « la cense de Bierhaut » [AGR, GSN, n° 382, WAV, XXI, p. 77] ; 1738, « le chemin tendant de la cense de Bierwart à Wavre » [AGR, GSN, n° 1536, WAV, XXI, p. 79] ; 1739, « le chemin allant de la cense de Bierwart » [OTA, p. 169] ; 1750, « la cense Biervaut » [AGR, GSN, n° 1539, D Martin ; WAV, XXI, p. 77] ; 1768, « la cense de Berwart » [AGR, GSN, n° 1542, WAV, XXI, p. 77] ; 1777, « la cense de Biereaux » [Ferraris] ; 1781, « le chemin allant de la cense de Bierwart à Ottignies » [AGR, GSN, n° 1545, WAV, XXI, p. 78 ; OTA, p. 170] ; 1788, (?), « la cense de Bierwart » [AGR, GSN, n° 1547, WAV, XXI, p. 77 ; LLNE, p. 63] ; 1837, « la cense de Biereau [WAV, XXI, p. 77] ; 1863, « cense de Beaurewart » [T&W‑W, p. 145]. Pour information, au Moyen-Âge, la cense était la « terre soumise au cens » ou la « redevance payée pour les terres ». En Belgique, et dans certaines parties de la France, « cense », wallon cinse, désigne une « ferme ou métairie » [TLF, FEW, II, p. 581a]. Ce mot est aujourd’hui considéré comme un archaïsme et est remplacé par « ferme », mais la forme wallonne cinse existe encore toujours. Autres formes avec « cense » : 1739, « la scavée de la cense de Bierwart » [WAV, XXI, p. 79 ; OTA, p. 169] ; 1764, « sur le grand champ de la cense de Bierwart » [OTA, p. 169] ; 1730, « la censière de Bierau », « la censière de Bierwart » [AGR, GSN, n° 1535, 1536, WAV, XXI, p. 77]. Les dictionnaires donnent généralement à « censière », mot dérivé de « cense », le sens de « femme du censier » [TLF ; GR]. Mais le mot désigne aussi « territoire donné à cens » (entre 1350 et 1400) [FEW, II, 1, p. 581a]. Ici, « censière » doit plutôt être pris comme synonyme de « cense ». 1798, « la ferme de Bieruwart » [WAV, XXI, p. 77] ; 1811, « ferme de Biereau » [PCP Ott] ; 1846, « la ferme de Bierraux » [ACV‑Ott] ; 1850, « la ferme de Bierwart » [WAV, XXI, p. 77] ; 1863, « ferme de Bierwart , tenue par M. J.‑B. Goes, appartenant à la veuve Goes de Gistoux » [T&W‑W, p. 140] ; 1884, 1893, (?), « ferme de Biereau » [ACE‑Ott ; CGB ; LLNE, p. 144] ; 1893, « ferme de Bierwart » [WAV, XXI, p. 77] ; 1968, « la ferme de Bierwart » [WAV, XXI, p. 77] ; 1972, « ferme de Bièrau » [IGM] ; 1981, 1987, « ferme du Biéreau [REUL ; InforV]. Autres variantes avec « ferme » : 1846, « le sentier de la ferme Bierewart aux Bruyères » [ACV‑Ott] ; 1846, « le chemin de la ferme de Bierwart à la neuve Baraque » [ACV‑Ott].

1655, 1750, « le bois de Bierwart, près de la Baraque » [AGR, GSN, n° 5999, WAV, XXI, p. 78 ; OTA, p. 169] ; 1777, « le bois de Biereaux » [Ferraris].

1738, « la campagne de Bierwart » [AGR, GSN, n° 1536, WAV, XXI, p. 78] ; 1752, 1863, « campagne de Bierwart » [OTA, p. 169 ; T&W‑W, p. 145] ; 1786, « en la campagne de Bierwart sous Ottignies » [WAV, XXI, p. 78] ; 1846, « la campagne de Biéraux, la campagne dite Berieaux » [ACV‑Ott] ; 1860, (?), « campagne de Biereau » [Popp‑Ott ; LLNE, p. 63] ; 1972, « campagne de Bièrau » [IGM].

1722, « terres de Bierwart » [AGR, GSN, n° 1535, D Martin].

1774, « commune de Bierwart » [AGR, GSN, n° 1543, WAV, XXI, p. 78]. En toponymie, « commune » a très souvent le sens de « biens communaux » [BTD, XXXII, pp. 125-126].

1846, « le champ de Bierreau » [ACV‑Ott].

1846, « chemin du fond de Bierreau vers Les Bruyères » [ACV‑Ott] ; 1863, « fond de Bierwart » [T&W‑W, p. 145].

I. Lejeune

              

              

  

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