Les rues de LLN

rue Édouard Massaux

rue: rue Édouard Massaux
canton postal: 1348
localité: Louvain-la-Neuve
description:

Massaux

Massaux (rue Édouard)                  [en réserve]

Conseil communal du (/).

Toponyme créé (toponyme non descriptif).

*       Thème des figures de nos régions.

*       Thème du passé universitaire.

*       Thème des sciences humaines.

C’est à la demande du Conseil Communal que la question s’est posée d’honorer, à travers sa toponymie, la mémoire de deux « pères fondateurs » de Louvain-la-Neuve : Michel Woitrin ( 28 octobre 2008) et Édouard Massaux ( 25 janvier 2008) [PV OL 9]. La Commission de toponymie n’y était pas favorable, rappelant que la fonction première des noms de rue n’est pas d’honorer un « héros » qui vient de mourir (pertinence en termes de mémoire ?), mais bien de contribuer à l’appropriation de lieux concrets, éventuellement chargés d’histoire. Sans s’y opposer formellement (suggérant alors que l’on choisisse des voiries importantes à construire au centre ville), elle préconisait plutôt de donner ce type de noms à des lieux « prestigieux » de l’Université, par exemple à des salles de l’Aula Magna.

*    Édouard Massaux naquit le 27 septembre 1920, à Neufchâteau, en Ardennes, où son père exerçait la fonction d’huissier de justice au tribunal de première instance. Après avoir fréquenté dans cette même ville l’École Saint-Joseph pour les maternelles et l’Institut Saint-Michel pour les primaires et les trois premières années des humanités gréco-latines, il termina celles-ci en internat au Petit Séminaire de Bastogne. Il s’engagea ensuite dans les études ecclésiastiques, à commencer par deux années passées à l’Université grégorienne pontificale de Rome pour conquérir le grade de bachelier en philosophie. En 1940, il se retrouva seul avec son frère Jacques après la mort de ses parents tués par des Allemands à La Panne. La même année, il entra au Grand séminaire de Namur pour y accomplir ses études de théologie et il fut ordonné prêtre le 18 mai 1944 par Mgr André-Marie Charue, qu’il tint en très haute estime et dont il demeura proche toute sa vie. Celui-ci l’envoya à la Faculté de théologie de l’Université catholique de Louvain, où il obtint en 1948 le grade de docteur en théologie. Deux années plus tard, il défendit sa thèse de maîtrise, un gros ouvrage de 730 pages publié sous le titre L’influence de l’évangile de saint Matthieu dans la littérature chrétienne avant saint Irénée. Ce livre qui peut paraître précurseur d’une méthode développée deux ou trois décennies plus tard sous le nom de Wirkungsgeschichte — étude des effets produits dans l’histoire par la lecture d’un texte — est resté une référence dans le domaine, comme en témoigne sa réédition en 1986, avec une bibliographie mise à jour.

Après avoir obtenu, conformément au désir de son évêque, une licence en sciences bibliques de l’Institut biblique pontifical de Rome, il fut le premier théologien à décrocher en 1951 un mandat d’aspirant au Fond national de la recherche scientifique (FNRS). Il travaillait en étroite collaboration avec Mgr Lucien Cerfaux. Devenu professeur ordinaire en 1953, il donna des cours principalement de critique textuelle du Nouveau Testament, de grec biblique, d’histoire du milieu néotestamentaire et d’exégèse du Nouveau Testament. Il fut aussi chargé d’un cours de philosophie morale à l’Institut supérieur des sciences économiques appliquées. En 1959, il fut un des piliers du Congrès biblique international de Louvain, l’ancêtre du Colloquium Biblicum Lovaniense, colloque de renommée internationale qui se réunit toujours chaque année à Louvain. Mais sa carrière bifurqua en 1960 lorsqu’il fut choisi comme bibliothécaire en chef adjoint puis bibliothécaire en chef (1961) de l’importante Bibliothèque universitaire.

Des événements politico-linguistiques allaient bientôt provoquer l’une des périodes les plus tourmentées de l’histoire de l’Alma Mater et un nouveau tournant pour Édouard Massaux. Sur l’arrière-fond des discussions autour de la loi d’expansion universitaire, l’Université catholique de Louvain fut confrontée dès le début des années 1960 à la revendication flamande explosive que la partie francophone de l’institution quitte Louvain. En 1962, de nouvelles structures furent mises en place, dont les fonctions de prorecteurs des deux sections, francophone et néerlandophone. Le premier prorecteur de la section francophone fut Fernand Litt, auquel Édouard Massaux succéda en 1965. Il fut dès lors très directement engagé dans les discussions qui aboutirent en 1968 à la décision politique de créer deux universités — l’Université catholique de Louvain et la Katholieke Universiteit Leuven — et de transférer la première. Ulcéré par ce qu’il considéra comme une trahison de la hiérarchie catholique flamande sous la pression du fameux Walen buiten qui correspondait à l’idéologie de l’homogénéité culturelle fondée sur le droit du sol et à l’angoisse de la « tache d’huile » francophone autour de Bruxelles, Mgr Massaux, dont la devise de prélat était « La vérité vous rendra libre » (Jean 8,32), n’hésitait pas à la traiter de péché contre l’esprit.

Nommé recteur de l’Université catholique de Louvain en 1969, il le resta jusqu’en 1986. Les dix premières années de son rectorat (1969-1979) furent celles du partage à Leuven et du transfert. De cette époque date le surnom de recteur de fer qui lui fut attribué, eu égard à son franc-parler et sa dureté en négociation, à sa capacité aussi à tenir ferme la barre au plus fort de la tourmente. Le transfert impliquait la création d’une ville nouvelle à Louvain-la-Neuve et aussi celle du site universitaire et hospitalier de Woluwé-Saint-Lambert dans l’agglomération de Bruxelles. Bien préparé, grâce à une anticipation discrète, ce transfert périlleux fut mené de main de maître en tandem par Mgr Massaux et par le professeur Michel Woitrin, administrateur général de l’Université et « père de Louvain-la-Neuve ». De son côté, Mgr Massaux consacra tous ses efforts à moderniser son université, à en améliorer les modes d’enseignement et à réorganiser ses structures de recherches. À la fin des années 1970, les nuages, financiers cette fois, s’amoncelèrent à nouveau au-dessus de l’Alma Mater. Le contrecoup des chocs pétroliers se fit sentir pour l’ensemble du monde universitaire belge, mais il fut particulièrement ressenti à l’Université catholique de Louvain qui terminait à peine son grand déménagement. Il fallait donc gérer l’austérité découlant de la crise. L’autorité du recteur fut bien utile pour faire accepter par la communauté universitaire en 1982 un plan d’économie sévère, mais indispensable. Comme à son habitude, il releva le défi sans ciller.

Admis à l’éméritat en 1986, il quitta sa maison de la Naamsestraat à Leuven qu’il occupait depuis 1969 pour se retirer à Bioul, tout en se mettant au service de l’Évêché de Namur, en fonction des demandes qui lui étaient faites. Discret, il n’en portait pas moins une attention critique plutôt sévère et intransigeante envers les évolutions en général et celles de son université en particulier. C’est dans sa demeure de Bioul qu’il s’éteignit le 25 janvier 2008, après avoir exprimé sa volonté qu’aucun éloge funèbre ou académique ne soit prononcé et qu’aucune manifestation d’hommage ne soit organisée.

Bibliographie : R. Aubert, Mgr Édouard Massaux à l’UCL, dans De Leuven à Louvain-la-Neuve, un recteur, des régionales, Louvain-la-Neuve, 1986, p. 11-18 ; J.-P. Voisin, L’histoire rapportée et inachevée d’Édouard Massaux, prêtre et recteur. De Neufchâteau à Louvain-la-Neuve (Collection Hommes et destins), Paris-Bruxelles, 1986 ; Nature et mission de l’Université catholique. Actes du colloque organisé par la Faculté de théologie pour l’éméritat de Mgr Massaux (Louvain-la-Neuve, 25 avril 1986) (Cahiers de la Revue théologique de Louvain, 17), sous la dir. de R. Gryson, Louvain-la-Neuve, 1987 ; É. Massaux, Dieu et mes père et mère. La foi de mon enfance à Neufchâteau d’Ardenne. 1920-1938 (Terres secrètes), Bruxelles, 1991 ; Id., Pour l’Université catholique de Louvain. Le « recteur de fer » dialogue avec Omer Marchal (Grands documents Didier Hatier. Histoire, récits, documents humains), Bruxelles, 1987.

C. Focant

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