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Collège Albert Michotte

Collège Albert Michotte
1348
Louvain-la-Neuve

Michotte

Michotte (collège Albert)                    D5

Domaine universitaire.

Toponyme créé (descriptif indirectement descriptif).

*       Thème du passé universitaire.

*       Thème des sciences humaines.

L’actuelle Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation est installée depuis 1995 dans le « Collège Albert Michotte », après avoir occupé, suite au transfert à Louvain-la-Neuve en 1977, des bureaux provisoires situés à la Grand-Rue. Le choix de ce patronage s’explique aisément : la faculté actuelle, constituée de façon autonome en 1969, trouve son origine dans l’« École de pédagogie et de psychologie appliquée à l'éducation » fondée en 1923 par Albert Michotte au sein de Faculté de philosophie et lettres.

*    Albert-Édouard baron Michotte Van den Berk a été un grand psychologue et homme de sciences, connu et reconnu internationalement. Il est né à Saint-Gilles le 13 octobre 1881. Il est issu d’un milieu cultivé. En effet, il est le fils d’Edmond Michotte (1831-1911), compositeur de musique et mécène et son frère, le chanoine Paul Michotte (1876-1940), géographe, enseignera lui aussi à l’Université de Louvain. Dès l’âge de seize ans, en 1897, Albert s’inscrit à l’Institut supérieur de philosophie de l’Université de Louvain. Trois ans plus tard, après avoir présenté une thèse sur l’éthique de Spencer, il acquiert le grade de docteur en philosophie. Après l’obtention du grade de candidat en sciences naturelles en 1902, il s’inscrit à la Faculté des sciences où il se forme, dans le laboratoire du neurologue Arthur Van Gehuchten, aux techniques d’anatomie nerveuse. C’est un moment-charnière dans sa carrière. En effet, Mgr Mercier souhaite développer les activités du laboratoire de psychologie, inauguré en 1893 et dirigé à l’époque par Armand Thiéry. Percevant ses inclinaisons pour la recherche expérimentale, il lui offre de se consacrer à la recherche en psychologie, dans le cadre de l’Institut de philosophie. Michotte accepte ; de formation philosophique et homme de sciences, il sera psychologue de tendance expérimentale. En 1905, il obtient le grade d’agrégé de l’École de Saint-Thomas, après avoir présenté une étude expérimentale : Les signes régionaux. Nouvelles recherches expérimentales sur la répartition de la sensibilité tactile dans les états d’attention et d’inattention. Il est nommé chargé de cours en 1906, professeur extraordinaire en 1908 et professeur ordinaire en 1912. Il fait plusieurs séjours d’étude en Allemagne, à Leipzig chez Wilhelm Wundt, en 1905 et 1906, puis à Würzburg chez Oswald Külpe, en 1907 et 1908. Ce dernier lui fait découvrir la méthode d’introspection systématique appliquée à l’étude des processus psychiques supérieurs. À son retour d’Allemagne, Michotte abordera par cette méthode des problèmes appartenant à ce domaine. Pour accompagner les données introspectives, il utilise des méthodes objectives, par exemple des enregistrements de temps de réaction. Une nouvelle période de l’activité scientifique d’Albert Michotte s’ouvre avec la fin de la première guerre mondiale. Du point de vue méthodologique, des méthodes d’analyse plus objectives remplaceront la méthode introspective systématique. Les problèmes envisagés concernent désormais le domaine de la perception et le domaine de l’apprentissage. Par ses recherches sur les processus perceptifs, Michotte adopte très vite les conceptions générales de l’activité perceptive défendues par les représentants de la psychologie de la Gestalt, entre autres Wertheimer, Köhler et Koffka. En 1923, il crée, au sein de la Faculté de philosophie et lettres, l’École de Pédagogie et de psychologie appliquée à l’éducation. Vers les années 1928-1930, sous l’influence du Behaviorism, autre grand courant de pensée de la psychologie né aux États-Unis au cours des années 1920, les travaux du laboratoire de Louvain portent sur le domaine des réactions motrices, en particulier sur l’apprentissage moteur. En 1944, il fonde l’Institut de psychologie, premier institut universitaire qui offrait un enseignement psychologique complet. Rattaché dans un premier temps à la Faculté de philosophie et lettres, il aura à partir de 1969, le statut de faculté. La troisième période dans son activité scientifique, la plus importante, commence au début de la Seconde Guerre mondiale. Les travaux de cette dernière période montrent l’intérêt que porte Michotte à des problèmes situés aux confins de la psychologie positive et de la phénoménologie. Michotte s’intéresse à nouveau aux problèmes de perception. Cependant, il aborde plus particulièrement le problème de la perception de l’action causale, la saisie phénoménale de certaines formes d’action. Il va étudier ces phénomènes durant plusieurs années, grâce à différentes méthodes, notamment grâce à la machine Michotte, élaborée dans les greniers de l’Institut de philosophie dans le cadre de ses recherches sur la perception à cette époque de « ferveur phénoménologique ». Elle est faite d’ellipses de couleurs dont le mouvement coordonné fait apparaître des figures fugitives que le sujet d’expérimentation doit capter. Le graphique, daté et signé de sa main, que les chercheurs gardaient à titre de guide à côté de l’appareil, a été conservé. Il publie en 1946 les principaux résultats de ces recherches dans La perception de la causalité, réédité en 1954 et traduit en anglais en 1963. Ce livre marque une date dans l’histoire de la psychologie de la perception. Michotte prend officiellement sa retraite en 1952 bien qu’il continue à donner des cours de psychologie générale et expérimentale jusqu’en 1956. Il arrêtera ses activités dans son laboratoire en 1962. Michotte, en plus d’avoir été un homme de science et un chercheur de haut niveau, s’est également révélé un brillant professeur et conférencier. Il donnera entre autres cours en candidatures en science et les cours de Questions approfondies aux étudiants en licence en philosophie et en psychologie, sans s’aider de notes et s’exprimant avec une grande clarté. Un étudiant a dit de lui : « Il a été un de ceux qui nous ont appris à observer ». La porte de son bureau, dans les toits de l’Institut de philosophie, était ouverte aux étudiants et il les écoutaient et conseillait volontiers. Très vite, sa renommée est devenue internationale. Il sera invité comme conférencier ou comme visiting professor dans de nombreuse universités à l’étranger : à Oxford en 1926, à Cambridge, Londres et Barcelone en 1927, à Rostock en 1928, à Groningue, Utrecht et Stanford en 1929, à Santander en 1935, à Amsterdam et Genève en 1936, au Collège de France en 1937, à Reading et à Rome en 1938, ainsi qu’à Grenoble et à la Sorbonne en 1939. Après la Seconde Guerre mondiale, il se rendra aussi, et à plusieurs reprises, en France, en Italie, en Hollande et en Angleterre. Il a également été le fondateur de la Société belge de psychologie, le premier président de l'Association de psychologie scientifique de langue française, et président de l'Union Internationale de psychologie scientifique. Il a été fait docteur honoris causa des Universités de Cambridge (Royaume-Uni), de Nimègue (Pays-Bas) et de Montréal (Québec). Il sera membre de quantité de sociétés savantes : de l’Académie royale de Belgique, de l’Académie pontificale des sciences, de la Société française de psychologie, de la British Psychological Society (honorary fellow), de l’American Philosophical Society, de l’Académie des Sciences morales et politiques de Madrid, des Sociétés de Psychologie d’Espagne, de Suisse, d’Italie, de Suède et du Danemark. Dès 1909, il fait partie du comité organisateur des Congrès internationaux de psychologie. Il semble qu’il n’ait manqué aucune réunion au cours des soixante années que dura sa carrière scientifique. Il y rencontrera les principaux représentants de la psychologie et se liera d’amitié avec nombre d’entre eux qui viendront lui rendre visite à Louvain. Il décède le 2 juin 1965 à Kessel-Lo (Louvain).

Bibliographie : G. de Montpellier, Notice sur le Baron Albert Michotte van der Berck, dans Annuaire de l’Académie royale de Belgique, t. CXXXIV, Bruxelles, 1968 ; J.-R. Nuttin, La vie et l’œuvre du professeur Michotte, dans Psychologia Belgica, t. V, 1965 ; Id., Albert Édouard Michotte van den Berck. 1881-1965, dans The American Journal of Psychology, t. LXXIX, n° 2, juin 1966, p. 331-333 ; G. Thinès, A. Costall, et G. Butterworth, Michotte’s Experimental Phenomenology of Perception. Review, dans The American Journal of Psychology, t. CVII, 1994, n° 2, p. 275–276 ; M. Richelle, P. Janssen et S. Brédart, Psychology in Belgium, dans Annual Review of Psychology, t. XLIII, 1992, p. 505-529; J. Wagemans, R. Van Lier, B.J. Scholl, Introduction to Michotte’s heritage in perception and cognition research, dans Acta Psychologica, t. CXXIII, 2006.

S. Lemaître

→         Carnoy ; Mercier.

              

  

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