Les rues de LLN
sentier de l'Europe
Europe
Europe (sentier de l’) B1-C1-D1-E1
Conseil communal du 1er mars 1976.
Toponyme créé (toponyme non descriptif).
* Thème du patrimoine européen et universel.
* Thème de la construction européenne.
Un « sentier de l’Europe », chemin communal, se trouve dans le bois de Lauzelle, à la limite entre Ottignies et Louvain-la-Neuve.
* Europe est d’abord un mythe grec. Alors qu’elle joue avec ses compagnes sur la plage de Sidon ou de Tyr dont son père était roi, Europe éblouit Zeus par sa beauté. Enflammé, celui-ci se transforme en taureau blanc et vient se coucher aux pieds de la jeune fille. La première frayeur passée, elle caresse l’animal et s’assied sur son dos. Soudain, le taureau se dresse et s’élance vers la mer. Zeus enlève Europe et la porte jusqu’en Crète où, à Gortyne, il s’unit à elle près de platanes « qui en mémoire de ces amours gardèrent le privilège de ne jamais perdre leurs feuilles » (Grimal).
Les prolongements de la légende sont connus. Cadmos part à la recherche de sa sœur et fonde Thèbes.
Au-delà de la légende, les historiens s’accordent à dire que les pérégrinations de Zeus, Europe et Cadmos entre la Phénicie, la Crète et le continent grec recouvraient des réalités économiques et culturelles correspondant aux grands axes de déplacement des foyers de civilisation du Proche-Orient vers des régions d’Occident qui furent ensuite nommées Europe. C’est pourquoi il est généralement admis que le mot même est d’origine assyrienne, Ereb désignant pour les Assyriens ce qui pour eux était l’Occident.
Les Grecs, qui divisaient l’univers en deux ou trois continents, adoptèrent le nom d’Europe pour désigner « leur » continent dont les contours restaient fort vagues et obscurs. En revanche, l’iconographie antique, des modèles grecs à leur adaptation par les Romains, fournit progressivement une image aux contours fort nets. Europe devient l’épouse épanouie du roi de l’Olympe et de ce fait une « figure emblématique de féminité et d’apothéose » (Wattel-de Croizant) avant que d’illustrer, dans l’Antiquité tardive, les concepts « d’ordre et d’unification » (Morand).
Mythe d’un côté, images de l’autre, ont traversé le temps. Mais aujourd’hui, seule demeure l’image renvoyant à l’ordre et à l’unification, c’est-à-dire à la construction européenne.
Ceci étant, le mythe grec ne parle pas à tous les Européens. Dans l’Europe du Nord, en Europe centrale et orientale, en effet, le substrat historique et culturel ne connaît pas l’enlèvement d’Europe. Cette méconnaissance doit être soulignée car elle est significative du fait qu’en termes de géopolitique comme de civilisation, ce n’est pas toujours au même espace, à la même Europe que l’on se réfère.
Les géographes inscrivent l’Europe dans l’espace compris entre l’Atlantique et l’Oural. Ils y incluent donc la Russie au sujet de laquelle, depuis le XVIIe siècle au moins, la question se pose de savoir si elle appartient, au plan politique et économique, au continent. C’est dire que les historiens et les politologues notamment sont loin de partager le point de vue des géographes. Il existe, disent les historiens, une Europe aux frontières changeantes, non limitée par un cadre géographique précis.
Cette géographie à géométrie variable implique l’obligation de replacer chaque fois le concept d’Europe politique, culturelle, voire économique, dans son contexte historique. Ainsi, l’Europe chrétienne du Moyen-Âge par opposition au monde musulman ne doit pas être confondue avec la conception de l’Europe d’Adolf Hitler. Quant à la guerre froide, elle a montré qu’une césure était imposée entre une Europe de l’Ouest et une Europe de l’Est. Or, depuis 1989 et les retrouvailles avec l’Europe centrale et l’Europe orientale, la notion d’Europes (Attali) est plus que jamais à l’ordre du jour. La déconstruction/reconstruction de l’espace européen interpelle donc en termes d’espaces et de frontières qui vont au-delà des limites géopolitiques et posent la question de l’identité européenne.
Bibliographie : Les Europes des Européens, sous la dir. de R. Giraud, Paris, 1993 ; P. Grimal, Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Paris, 1969, p. 151 ; Identité et conscience européennes au XXe siècle, sous la dir. de R. Giraud, Paris, 1994 ; I. Morand, Idéologie, culture et spiritualité chez les propriétaires ruraux de l’Hispanie romaine, Paris, 1994 ; O. Wattel-de Croizant, Les mosaïques représentant le mythe d’Europe (Ier-VIe siècles). Évolution et interprétation des modèles grecs en milieu romain, Paris, 1995.
M. Dumoulin
→ Ariane ; Bologne ; Charlemagne ; Monnet ; Traité de Rome ; Union Européenne.