Les rues de LLN

parc scientifique Fleming

parc scientifique Fleming
1348
Louvain-la-Neuve

Fleming

Fleming (Avenue Alexander) F11-F12

Fleming (parc scientifique)

Conseil communal du 25 novembre 1996.

Toponyme créé (toponyme non descriptif).

*    Thème du patrimoine européen et universel.

*    Thème des sciences exactes.

Est-il besoin de rappeler que c’est Alexander Fleming qui « découvrit » accidentellement la pénicilline ?

C’est en 1995 qu’il a été décidé d’appeler les différents quartiers du parc scientifique du nom d’une personnalité de renommée internationale et qui soit, si possible, également le nom d’une artère du quartier [PV 40]. Pour ce qui est devenu le « parc scientifique Alexander Fleming », la Commission avait pensé au départ rebaptiser l’ancienne « rue des Més » « rue Ernest Solvay », qui eût été alors éponyme pour le « parc scientifique », tout en récupérant la « rue des Més » à son actuel emplacement. C’est finalement l’« avenue Alexander Fleming » qui a été retenue, parce que « rue Ernest Solvay », fort répandue par ailleurs, risquait d’engendrer une confusion avec la firme Solvay.

*   Alexander Fleming (Écosse, 6 août 1881-Londres, 11 mars 1955) reçut le prix Nobel de physiologie et de médecine de 1945, pour la découverte de la pénicilline et de ses effets curatifs dans diverses maladies infectieuses, conjointement avec Ernst Boris Chain et Howard Walter Florey. La découverte de la pénicilline revient en fait à Fleming qui était bactériologiste, et comme de nombreuses découvertes scientifiques, elle est autant le fruit de la chance et des circonstances que des compétences scientifiques et d’un plan de recherche méticuleux.

Le jeune Alec, pourtant, débute sa formation dans des circonstances difficiles. Orphelin de père à l’âge de 7 ans, il fréquenta l’école primaire locale pendant que sa mère reprenait la direction de la ferme familiale. Il apprend très tôt à observer la nature, en faisant quotidiennement à pied le chemin des écoles successives, distantes d’abord de 4 miles puis de douze. À l’âge de 13 ans, il suit ses frères et beau-frère à Londres, ce qui permet à ce dernier de pratiquer la médecine et à Alec de poursuivre ses études puis de s’enrôler dans le London Scottish Regiment. Doté d’un petit héritage, il décide d’entamer des études de médecine. Excellant aux concours, il reçoit une bourse qui lui permet d’étudier et de travailler dans la St Mary’s Hospital Medical School à partir de 1901. Il y rencontre son mentor, Sir Almroth Wright. Il accumule les prix et termine un brillant cursus d’étude en 1909, moment où il est admis au Royal College of Surgeons of England. Fleming devient le directeur adjoint du département d’inoculation du St Mary’s Hospital en 1921, qui sera fusionné en 1933 avec l’Institut de Pathologie et de Recherche. À partir de 1921, il est aussi titulaire de la chaire de bactériologie à l’Université de Londres, jusqu’à sa retraite en 1948. Fleming laisse la direction de son Institut, qu’il continuait de superviser, en janvier 1955 et meurt deux mois plus tard. Sa première épouse Sarah Marion Mc Elroy, une infirmière gérante d’un home pour seniors, lui donne un fils Robert, qui fut médecin lui aussi. Elle décède en 1949 et Fleming se remarie avec une bactériologiste grecque, Amalia Coutsouris-Voureka, en 1953.

À St Mary’s, Fleming pratique la doctrine d’immunisation spécifique contre les infections bactériennes par vaccination de son maître Wright. Il fut l’un des premiers à traiter la syphilis par le Salvarsan, dont Paul Ehrlich avait envoyé un échantillon à Wright. Durant la Première Guerre mondiale, alors qu’il sert comme capitaine dans le corps des Médecins militaires, il poursuit ses recherches sur les plaies infectées et démontre le pouvoir bactéricide du pus et l’impuissance des désinfectants chimiques à stériliser les plaies. Il constate d’abord cliniquement et ensuite par expériences sur lames de verre, que l’injection de ces mêmes désinfectants par voir intraveineuse détériore les leucocytes (globules blancs) du sang infecté sans inquiéter les bactéries, qui requièrent en fait une concentration bien plus élevée du produit. Il publie ses conclusions durant la Première Guerre mondiale, mais les pratiques de ses confrères sur les soldats blessés ne changeront guère : nombre d’entre eux continuent de mourir de septicémie, parce que les antiseptiques détruisent leurs défenses immunitaires plus vite qu’ils n’exterminent les bactéries.

Fort de ce constat, il oriente dorénavant ses recherches pour trouver des agents anti-bactériens qui entraveraient la multiplication des bactéries hostiles sans affecter le tissu sain. Bien qu’il n’ait pas cherché de telles substances de façon systématique, c’est donc un esprit préparé qui fait deux découvertes cruciales au détour de ses recherches. En 1922, il découvre le lysozyme, cet agent anti-bactérien que le corps secrète lui-même. Il le détecte dans le sérum du sang, la salive, le lait, les larmes mais aussi dans des nombreuses substances animales et végétales.

Fleming était un chercheur réputé, mais il lui arrivait fréquemment d’abandonner ses cultures, de ce fait souvent contaminées. Un jour qu’il fait visiter son laboratoire, il repère des boîtes de Petri qu’il avait retrouvées contaminées par un champignon à son retour de vacances et qu’il avait trempées dans du désinfectant. En reprenant certaines de ces boîtes, il constate qu’elles ne sont pas complètement immergées dans le désinfectant et il observe une zone où la progression des bactéries a été arrêtée en bordure d’un champignon. Très vite il identifie ce champignon comme étant de la famille du penicillium et baptise l’agent bactéricide pénicilline (penicillin en anglais). Il publie ses résultats en 1929 en soulignant que l’action de la pénicilline même diluée 800 fois n’interfère pas avec le travail des leucocytes et est non-toxique (tests sur animaux de laboratoire).

La chance, disait Pasteur, favorise les esprits bien préparés. Rien de plus vrai dans le récit de la découverte de la pénicilline. Au moment de la première identification de cet agent miracle, Fleming en effet cherchait un remède contre la fièvre typhoïde et paratyphoïde, mais son service durant la guerre l’avait sensibilisé à la problématique de nombreuses autres infections (staphylocoque, pneumonie, diphtérie, gonorrhée, méningite, etc.). Par ailleurs, le même genre d’incident, c’est-à-dire l’infection d’une culture par penicillium, s’était certainement déjà produit dans les laboratoires par le passé. Mais la plupart des observateurs, obnubilés par l’idée d’aseptiser, n’avaient pas noté qu’en réalité, une culture bactérienne était infectée : on pouvait donc infecter les bactéries comme elles infectaient les tissus sains. Trente-deux ans auparavant, un jeune médecin militaire, Ernest Duchesne (Paris, 1874–Amélie-les-Bains-Palada, 1912) était arrivé aux mêmes conclusions dans sa thèse défendue en 1897 : que le champignon penicillium en culture avec une bactérie (Escherichia coli) élimine complètement cette dernière. Il proposa d’étudier davantage la concurrence entre microbes et moisissures, mais la suite de sa carrière l’éloigna des laboratoires et l’École du Service de santé militaire de Lyon ne jugea pas utile de poursuivre les recherches. De cet épisode, on peut identifier deux facteurs supplémentaires qui ont favorisé Fleming, qui lui, a poursuivi les recherches et isolé le principe actif « pénicilline » : il était nommé chercheur à vie et l’institution qui l’accueillait lui a laissé le temps de développer ses recherches et d’épanouir ses idées (pour mémoire il travaillait au St Mary’s Hospital depuis plus de 20 ans !) tandis que son service militaire durant les années de guerre avait permis de constater de première main les effets des différentes thérapeutiques antiseptiques. Le français Duchesne se trouvait dans la position inverse : trop d’armée et pas assez de « perte de temps » au laboratoire...

Dernier et ultime facteur favorable, la Deuxième Guerre mondiale constituera le catalyseur pour l’histoire de la pénicilline. La publication de Fleming de 1929 n’attire que peu d’attention, et lui-même, avec ses compétences limitées en chimie, a bien du mal à cultiver le champignon, pour en extraire la pénicilline miraculeuse. Les premiers essais cliniques se révèlent peu concluants, et il faut rappeler qu’à cette époque, les sulfamides étaient déjà d’usage courant et donnaient satisfaction. Même s’il réussit à guérir complètement un patient atteint de conjonctivite aiguë en 1933, ce n’est qu’en 1938 qu’Howard W. Florey (Adélaïde, 1898-Oxford, 1968) relit l’article de Fleming et purifie la pénicilline dont il est convaincu de l’efficacité. Ernst B. Chain (Berlin, 1906-Mulrabny, Irelande, 1979), biochimiste juif allemand émigré à Oxford, rejoint le groupe de Florey l’année suivante et trouve la façon d’isoler et de concentrer la pénicilline. Il en élucide la structure. Enfin Norman Heatley (Woodbridge, 1911-Oxford, 2004) met au point un procédé qui permet de produire la pénicilline à l’échelle industrielle. Les très nombreux blessés à traiter sont une occasion d’étudier de près et d’améliorer les traitements par ce nouvel antibiotique.

Au fur et à mesure que l’efficacité de la pénicilline fut reconnue, Fleming reçut honneurs et récompenses. Il fut reçu à la Royal Society en 1943, fait chevalier en 1944. D’un naturel plutôt discret, et orateur peu éloquent, il accepta néanmoins de donner des conférences à travers le monde, notamment aux États-Unis. Il resta cependant toujours très modeste, et ne manquait pas une occasion de souligner le rôle de Florey et de Chain dans le succès de la pénicilline. À trois, ils reçurent le Prix Nobel de physiologie à la fin de la guerre qui créa la demande massive d’antibiotiques et favorisa ainsi le plein développement d’une découverte faite plus de vingt ans auparavant dans un laboratoire pas trop bien tenu ... mais vivant !

Bibliographie : G. Macfarlane, Alexander Fleming. The Man and the Myth, 1984 (traduction française : Fleming 1881-1955. L’homme et le mythe, Belin, 1990) ; A. Maurois, La vie de Sir Alexander Fleming, 1959.

B. Van Tiggelen

→   Més ; Solvay.

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